Moonless World

Le visage du garçon se ferma immédiatement, et il détourna le regard, avant de se lever, le corps raidi, s'éloignant de Clint pour se perdre dans le coin cuisine, farfouillant quelque chose derrière le bar. Un silence froid s’abattit sur la pièce, gelant toute l'intimité et la complicité qui s'étaient précédemment établies entre eux. On entendait que le bruit du verre qui s'entrechoquaient sous les gestes du sokovien, qui semblait hésiter entre se servir à boire et ranger le bar. Clint se figea, comme pétrifié, et fixa le gamin sans comprendre, blessé par ce rejet silencieux et soudain. Les minutes s'étirèrent.

- Maximoff ? Tenta-t-il prudemment.

L'autre l'ignora, et d'autre minutes polaires s'écoulèrent, Clint tendu sur son fauteuil, mal à l'aise et perdu, Pietro dans la cuisine, en mouvement permanent. Tout le corps de l'archer lui semblait glacé, et son esprit semblait lui aussi paralysé. Pourquoi cette attitude ? Est-ce qu'il avait dit quelque chose de mal ? Avec un dernier soupir, il refoula l'angoisse et la douleur qui le tiraillaient, et renonça à saisir les sautes d'humeur du plus jeune. Il se leva doucement, sans bruits, et fit quelques pas vers la porte. Si il n'avaient plus rien à se dire, alors autant qu'il laisse le jeune homme dormir, au moins, la chose aurait un vague coté positif.

- Bon, j'y vais alors, prononça il doucement. A un de ces jours, gamin.

Un fracas de verre brisé retentit dans le calme de la pièce. Clint se tourna instinctivement vers le bruit et Pietro, qui le fixait de derrière le bar, avec ce qui semblait être un soupçon de panique dans le regard. Hésitant, il resta là, figé, alors que de longues secondes s'écoulaient entre eux, leur regard figé l'un dans celui de l'autre, et une étrange crispation dans l'estomac. Pietro aussi semblait s'être pétrifié en plein geste, la main encore levé alors que les débris de verre et le vin tachaient déjà le carrelage immaculé de la cuisine. Des cheveux pâles tombaient dans ses yeux. Tout semblait presque ralentit, suspendu. Puis, le portable de Clint vibra dans la poche de son jean. Et tout revint à la réalité. Agacé, résistant à l'envie de sortir son téléphone, l'archer s'apprêtait à se détourner à nouveau quand Pietro parla, d'une voix ferme, bien que légèrement plus aigu qu'à l'accoutumée.

- Je t'ai sauvé la vie.

Clint ouvrit de grand yeux, surpris que le jeune homme sorte finalement de son mutisme. Il réprima une grimace et avec, l'agacement et le malaise que les mots du jeune homme aaient éveillé en lui. L'expérience lui avait appris à éviter autant que possible d'avoir des dettes envers qui que ce soit, et il se trouvait qu'en l'occurence, que cela lui plaise ou non, il en avait une grosse envers l'adolescent. Cependant, il n'avait jusque là pas vraiment envisagé la chose sous cet aspect, ni pensé à ce que pourrait lui coûter le genre de promesse qu'il lui avait faites plus tôt. Et franchement, les quelques mots finalement prononcés par le sokovien ne lui inspirait rien, mais alors rien de terriblement positif. Il se força à répondre calmement, ignorant difficilement la méfiance et la désagréable sensation d'être contraint au profil de sa gratitude et de son affection envers Pietro.

- Je sais, marmonna vaguement l'archer sans vraiment le regarder. J'ai une dette envers toi, et je t'ai dit que je vous aiderai, ta sœur et toi, du mieux que je pourrais-

- Tu as dit n'importe quoi, l'interrompit Pietro.

La panique et l'empressement qu'il percevait dans la voix du plus jeune commençait vraiment à l'inquiéter. Bien plus même que les probabilités de devoir faire un truc dingue – parce que ça allait être dingue évidemment connaissant ce bâtard de coureur – par devoir, ou d'être une nouvelle fois instrumentalisé, chose qu'il détestait par dessus tout. De toute façon, il avait promis alors… Et puis il ne comprenait pas où il voulait en venir. Il serra nerveusement ses doigts sur le bas de sa veste, répondant d'une voix un peu tendue :

- Oui, c'est ce que j'ai dit, mais-

- Embrasse-moi.